Le vent et les peaux
Patrick :
Au réveil nous avons la pluie mais plus que les gouttes, le
vent, un vent violent que nous allons avoir de face la première moitié de notre étape de 66 km environ.
Dès les premiers kilomètres nous comprenons que ce ne sera pas
facile aujourd’hui et qu’il faudra lutter et ne rien lâcher contre ce vent de 55 km/h.
Effectivement, pédaler les mains sur les freins c’est bien une
expression qui sied.
Nous essayons de nous arrêter le moins possible. Titi est
vaillant et une petite poussette de temps en temps lui permet de ne pas se décourager et ne rien lacher. Pour ma part je me sens bien et les jambes répondent bien.
Les derniers kilomètres sont usants avant de tourner sur la
droite et prendre un vent ¾ arrière.
La ville de Normandin et voici notre pause déjeuner vers
13h30. Enfin un horaire ‘normal’ pour notre repas de midi. Je rappelle qu’ici on appelle cela le diner.
Au programme dans ce village la visite d’une
tannerie-taxidermiste. Ce n’est pas tout à fait une tannerie mais Claire apportera expliquera plus de détails. Ce qui peut paraître surprenant chez nous ne l’est pas au Canada. La trappe des animaux
est extrêmement réglementée avec des autorisations, des quotas strictes et des déclarations de prises au gouvernement Canadien. Aucun trafic possible et surtout une préservation des espèces. C’est
leur mode de vie depuis toujours et ils sont très attentifs à préserver leurs ressources. Je pensais être gêné voir scandalisé par ce type d’entreprise, à ma grande surprise toutes ces peaux de
castors, de renards ou de lynx ne choque pas.
On repart en milieu d’après-midi, le vent a changé un peu et
nous le prenons à nouveau un peu de face.
L’arrivée sur Dolbeau-Mistassini se fait dans la pénombre il
est 19h45, cela ne nous empêche pas de voir les rapides de cette partie du fleuve Mistassini.
Claire
:
Départ pour la ville de Dolbau-Mistassini à 10h30, en passant par Normandin. La première partie par Normandin est horrible, nous avons tout le temps le vent en plein
face avec d’énorme bourrasque par moment et sur la fin une pluie très très fine. Ce n’est pas très rigolo. Et chapeau à Titi a su prendre sur lui pour arriver jusqu’au bout. Arrivé à Normandin nous
pique-niquons dans un parc, puis nous partons visiter l’écomusée de Bilodeau, du Pelletier - Bottier et de la taxidermie.
Les écomusées au Québec mettent en valeur l’ensemble de la culture et du patrimoine liés à son territoire géographique et à son champ
d’intervention.
Dans cette entreprise artisanale et familiale qui emploie 85 personnes on a expliqué comment il travaillait la fourrure pour confectionner des
bottes, manteau, chapeau.... puis sur le travaille de taxidermie qui consiste à naturaliser les animaux. C’était très intéressant, car l’entreprise travaille de À à Z ses produits de la préparation
de la peau pour la nettoyer des graisses animales et lui incorporer des graisses végétales pour la conservation, en passant par le blocage (on tire sur la peau pour pouvoir récupérer le maximum de
cms), à la confection du produit puis l’empaquetage. Beaucoup de choses sont encore fait à la main par les ouvriers. La vente de fourrure d’animaux ici est quelque chose de naturel, qui fait parti de
leur identité et culture puisque la fourrure a toujours été la monnaie d’échange entre les Amérindiens et les français puis les anglais. Ce n’est pas malsain. La chasse est très réglementé et les
trappeurs ont un quota à l’année. Il tue souvent d’abord pour la viande quand l’animal est comestible et autrement pour la fourrure. Il faut savoir aussi que l’on peut récupérer beaucoup de chose sur
un animal pas que la viande et la fourrure mais aussi par exemple sur l’ours on va utiliser sa graisse pour faire des savons. L’ours blanc tant qu’à lui ne peut être tuer que par des Inuits
seulement.
L’entreprise travaille à l’internationale dans 27 pays. En France, l’on peut acheter en ligne tous les produits sauf ceux en fourrure de Loup
Marin à cause de Brigitte Bardot.
La chaleur d’un vêtement ou chaussure est à l’épaisseur de la peau, la qualité de la fourrure et des matériaux isolants
utilisés.
Ils utilisent des peaux de castor et de loup de mer pour la création de botte et plutôt de peau de poisson pour la création
d’espadrille.
L’entreprise intervient aussi pour le cinéma dans l’élaboration de vêtement ou dans la fabrication d’animaux, comme par exemple nous avons pu
voir la conception d’un Orignal articulé pour un film Québécois. Dans le film « une nuit au Musée », les vêtements de la femme esquimau ont été créé par la société
Bilodeau.
Nous avons quitté le musée à 16h30. Il nous restait encore 28kms à parcourir. Ça a été plus facile que sur la 1ère partie car le vent était
dans le dos. Par contre, dommage pour nous il était beaucoup moins fort voir presque inexistant. Par contre ce n’était que de la descente mais une route pas très agréable car les camions passés très
vite et de très près. Nous sommes finalement arrivés à 19h30, bien content que ça se termine.
Un peu d’histoire concernant le Lac St Jean : quand Jacques Cartier découvert le Québec, il fit du commerce de Fourrure avec les Amerindien à
Tadoussac (embouchure entre la rivière du Saguenay et le fleuve du St Laurent), il voulu remonter le Saguenay vers le Lac mais les Amérindiens le dissuadèrent. Les Amérindiens voulaient cacher le Lac
aux Français pour garder leur territoire de chasse et pouvoir continuer le commerce avec les français. Mais lorsque les Amérindiens tombèrent malades, ils demandèrent l’aide aux Français et c’est le
Jésuite Jean de Quen qui s’y rendit le premier d’où le nom de Lac St Jean (en Amerindien le Lac s’appelait Piékouagami qui signifie Lac Plat).
Valentin
:
Aujourd’hui, j’ai fait aucune chute. On a eu beaucoup de vent, au début 3/4 de côté, après on l’a eu de pleine face. C’était horrible jusqu’à Normandin. On a vu un
musée sur les fourrures. Il y avait plein d’animaux naturalisés, c’était bien car on nous a expliqué comment ça se faisait. Il y avait aussi des bêtes sauvage d’Afrique comme un tigre, léopard,
guépard... cela venait des différents zoos du Québec. Après jusqu’au Dolbeau Mistassini on a un le vent dans le dos et c’était beaucoup mieux.
Alizée
:
Alors aujourd’hui comme tous les jours, on a roulé. J’ai vu plein d’animaux naturalisés dans le
musée, il y avait même un bébé ours noir trop mimi.
Les rencontres
Patrick :
Une journée pour visiter, une journée pour se
reposer...
Au petit déjeuner nous retrouvons dans la salle du petit
déjeuner un couple de cycliste que nous avons rencontré hier sur la route. La discussion s’engage avec Dany un grand gaillard ancien militaire qui a été sur des différents théâtres d’opérations comme
l’Afghanistan ou la Bosnie. Il est bluffé par notre équipage et notre parcours. Il nous laisse ses coordonnés et nous invite à passer les voir la prochaine fois que nous viendrons dans la ville de
Québec.
Au programme de la journée, essentiellement la visite d’une
chocolaterie de bleuets faite par des pères trappistes de Mistassini dans une abbaye.
Nous ferons un peu de vélo, environ 18 km aller-retour pour
cette visite. Ce n’est pas du goût de Valentin qui considère que pendant une journée de repos on ne touche pas au vélo.
Prêt à partir en début d’après-midi nous croisons devant
l’hôtel un nouveau couple de cyclistes qui arrive à l'hôtel. On discute un peu et Carle et Caroline nous proposent de diner ce soir ensemble pour faire finir nos
conversations.
Enfin sur le
chemin, une halte pour approcher les chutes de Mistassini et faire
quelques photos, films et jeter des bâtons dans l’eau pour Valentin et Alizée. Une fois repartit, au détour d’un virage, 2 hydravions posés sur un lac. J’aperçois le pilote à côté d'un des 2 avions, je propose à Claire un arrêt. La conversation s’engage avec le
pilote, c'est un papetier à la retraite. Il part faire une petite balade avec son hydravion. Il pilote depuis l’âge de 20 ans. Sa femme est déjà installée à l’intérieur. Je lui demande s’il est
possible de faire des photos, il me propose beaucoup mieux, monter à la place du pilote, ce que bien sûr je ne refuse pas. Sa femme descend de l’avion et nous voilà avec Titi aux commandes de cet
hydravion. Je me dis que s’il me propose un petit tour je ne refuse certainement pas. Nous ferons ensuite photos et films lors du de son décollage sur le lac.
A nouveau sur la route nous voilà arrivé à l’abbaye, un joli
endroit avec de larges pelouses impeccables. D’un côté l’abbaye, de l’autre un bâtiment qui est certainement l’usine de fabrication du chocolat. Pascale une très jeune fille nous raconte l’histoire
de cet endroit avec en support 2 petits films. Nous goûtons les chocolats, ceux aux bleuets frais ont ma préférence.
Au comptoir un père trappiste Augustin Martel, un vrai
personnage, demande le prénom des enfants et offre une barre chocolatée Valentin et Alizée. Présent dans cette confrérie depuis 1946 je lui demande si ce n’est pas trop difficile de se lever tous les
matins à 3h45, avec beaucoup d’humour et de lucidité il me répond « oui durant les 50 premières années, après on s’habitue ».
De retour à l’hôtel, nous décidons avec Valentin d’aller voir
les chutes un peu plus en amont elles sont plus grandes que celles devant l’hôtel.
Carle et Caroline le couple de
Montréal à réservé une table au restaurant de l’hôtel. Nous passons
une soirée très agréable. Carle ancien professeur de gymnastique reconverti en officier pompier à Montréal, Caroline ingénieur en mécanique nous propose de partager demain matin le petit déjeuner et
goûter à une spécialité Québécoise.
Claire
:
Aujourd’hui c’est repos à Dolbau Mistassini. On a pris le temps au petit déjeuner pour discuter avec un couple de velocycliste qui finissaient aujourd’hui leur vacances et
que l’on avait déjà rencontré la veille sur le chemin. Lui, est un retraité de l’armée Canadienne, il a été sur place en Bosnie en tant que casque bleu et en Afghanistan. Elle, est kinésithérapeute à
son compte. Ça a bien duré 2 heures, c’était très intéressant de pouvoir converser avec des Québécois sur divers sujet concernant leur mode vie et la notre. Ils vivent à Québec et l’on décide de
s’échanger les adresses mail pour garder contact pour une prochaine occasion.
Puis vers 13h, nous décidons de partir faire une balade vers les chutes d’eau appelées « chutes des pères » de la rivière Mistassini. En sortant de l’hôtel, on
rencontre un coupe de voyageur à vélo qui arrivent, on commence à faire connaissance et l’on décide de souper ensemble pour faire plus ample connaissance. On part donc à vélo tout d’abord voir la
chute. C’était grandiose, l’eau tourbillonnais dans tous les sens. Alizée s’est amusée à lancer des bouts de bois qu’elle appelle « pastille ». Valentin était pas très rassuré et
s’inquiétait pour sa soeur.
Dolbeau-Mistassini est connue comme la Capitale mondiale du bleuet sauvage. Des kilomètres de plages de sable fin sont à portée de main notamment grâce au centre de
villégiature Vauvert-sur-le-lac-Saint-Jean. En plein cœur de la ville, des rivières aux chutes magnifiques témoignent de l’histoire de la fondation de la ville basée sur l’arrivée par les cours d’eau
des Pères trappistes à la demande du gouvernement et de l’église pour empêcher l’exode des français aux USA en développant une communauté agricole. Il existe aujourd’hui la célèbre chocolaterie des
pères trappistes que nous sommes allés visites après avoir pédaler 9 kms (aller/retour nous aurons donc fait 18kms) pas chargé c’est beaucoup plus facile.
Nous avons été accueilli par le père Augustin et par Pascale une employée saisonnière qui devait avoir entre 16 et 17 ans, car il faut savoir qu’au Québec les enfants
peuvent travailler à partir de 14 ans, voir 12 ans pour du baby-sitting après avoir passé une petite formation.
Le père nous montre une carte de France avec les différents monastères existant en France et nous lui désignons celui des Îles Lerins pour situer notre lieux de
provenance. La discussion s’enchaîne sur les vins que fabriquent les moines de Lerins et son monastère.
Pascale nous fit une visite éclair de la chocolaterie très intéressant. Les pères trappistes sont les précurseurs des bleuets sauvages enrobés de chocolat, ils se
fabriquent seulement entre juillet et septembre au moment de la cueillette du bleuets et ils ne se conservent seulement 2 semaines au frais. C’est un régal. C’est une entreprise familiale et
artisanale qui commercialise ses différents chocolats et guimauves (seul produit encore fabriqué comme à l’ancien temps), seulement sur le territoire Québécois. Elle emploie environ entre 30 et 50
personnes par an. Leur plus grosse vente sont celle des petites poules pour Pâques, qu’ils fabriquent entre octobre et mars. Ils fabriquent environ 2 700 000 petites poules.
C’est en 1939 qu’un groupe de citoyens de Dolbeau forme un comité d’initiatives industrielles: une pour le bois, l’autre pour le vêtement et la dernière pour les produits
alimentaires. De cette initiative est née une confiserie qui sera l’ancêtre de la chocolaterie. De l’équipement est alors acheté pour fabriquer un bonbon nommé «le bonbon du lac».
En raison de la guerre, en 1941, l’entreprise doit fermer et est rachetée par un citoyen qui demande l’aide des Trappistes pour faire fonctionner l’entreprise. Les
équipements sont alors déménagés au sous-sol de l’église abbatiale. À cette époque, l’entreprise porte le nom de Bonbons Saguenay.
En 1944, les Trappistes achètent finalement la machinerie et deviennent les uniques propriétaires sous la direction de Père Samuel Scher. En plus de la fabrication de
bonbons, les Trappistes entreprennent la production de fantaisies (chocolat) de Pâques. Au fil des années, la production de chocolat deviendra la production première de l’entreprise.
C’est en 1978 qu'on incorpore officiellement la Chocolaterie et que son nom change pour celui d’aujourd’hui: La Chocolaterie des Pères Trappistes de Mistassini. La
main-d’œuvre a toujours été partagée entre employés venus de l’extérieur et religieux de la communauté. La communauté est propriétaire de l’entreprise à 100% et la Chocolaterie a pour mission de
subvenir aux besoins de celle-ci.
Le nom « Pères Trappistes » vient que ces moines viennent de la ville de Trappes en France et non que ce sont des moines trappeurs comme je pensais.
Le soir nous avons donc souper avec nos amis cyclistes Carle et Caroline. Très bon moment de partage où Carl nous a raconté beaucoup de choses sur son métier de Pompier de
Montréal. Caroline tant qu’à elle est ingénieur mécanique dans une entreprise comme Veolia.
Valentin
:
J’ai beaucoup aimé monter dans l’hydravion et le voir voler. J’aurai aimé que le monsieur me propose de faire un tour. J’arrive à pédaler en lâchant les mains.
Alizée
:
J’ai adoré jeté des « pastilles » (bout de bois) dans les chutes d’eau. J’ai aimé joué dans le jardin du Monastère des Pères Trappistes : a faire de la
balançoire et courir avec Titi.